Rebondir, sauter d'une idée qui germa dans l'esprit d'une autre à mes souvenirs et mêler tout cela. N'est ce pas une pure merveille que nous offre l'internet ? Lire, au matin, quelques mots écrits ailleurs et aussitôt sentir surgir des images de moments qui pourraient être oubliés depuis longtemps.
Bibliothèque. Ce pourraient être des soirées à Beaubourg encore neuf et dénigré, ou des jeudi après -midi à rechercher le « Jules Verne » encore inconnu dans la partie baptisée « heures joyeuses » réservée aux enfants d'une bibliothèque municipale (ci contre aujourd'hui), mais non, ce sont des matinées avec trois camarades de classe, toujours les mêmes dans cette longue salle, au dessus des « heures joyeuses », étrangement lumineuse où nous nous installions pour rechercher la traduction d'un texte de César ou plus souvent de Sénèque.
C'était notre façon de faire ces devoirs de version latine. Certains puristes penseront que ce n'était guère honnête, pourtant avec le recul des années, je pense avoir plus appris en épluchant les ouvrages de la collection Guillaume Budé qu'en suant sur un Gaffiot trop lourd.
Et puis, si longtemps après, cela laisse ce souvenir du jour où notre professeur déclara, en rendant les copies « Messieurs, vous avez recopié le contresens de la collection Guillaume Budé ». Evidemment, sur le moment, c'était un peu gênant mais quarante ans plus tard, ou presque, cela fait un bien beau souvenir.
Et puis, somme toute, ce professeur d'un autre âge nous a beaucoup apporté. Il avait fait Normale avec Pompidou et Senghor mais lui terminait sa carrière comme simple prof d'un lycée de province. Très peu d'années après, Jean-Claude (ci contre), l'aumonier du lycée et prêtre dans la ligne de Vatican II, me dit qu'on l'avait appelé pour donner les derniers sacrements à celui que nous avions connu comme prof de latin et plus certainement comme passeur de culture. C'est étrange, nous aurions tous juré que ce professeur n'était pas croyant. Qui sait ce que nous penserons au dernier instant?