Cette fois, elle n’est plus là : la Seine a disparu. Je ne la verrai plus, le matin, ma tasse de café à la main. Elle coule pourtant, indolente malgré tous les cadavres qu’elle charrie, toutes les saloperies que les hommes cupides lui laissent. Elle descend doucement, sans tumulte, vers la mer encore lointaine.
Je la voyais. Elle n’est pourtant guère intéressante, elle n’est que l’un des bras contournant un de ses îles, et celui où les bateaux de commerce ne passent pas. C’est une rivière sans péniches, une eau sans la vie qui est mienne.
Je la voyais. Elle accompagnait mes gestes matinaux, ceux que l’on répète, ceux qui sont en réalité nos maîtres. Sans bateaux, mais elle était là. Elle n’y est plus.
La Seine est partie, jusqu’à l’automne.
Les pêcheurs de Poissy, Claude Monet, 1882