Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
18 avril 2013 4 18 /04 /avril /2013 09:38

 

« 30000 sans-abris, faut-il qu’ils dévoilent leur patrimoine pour qu’on en parle ? ».

C’est un tweet, cent fois renvoyé et répété qui m’est arrivé. Nous nous sommes amusés ici et ailleurs à propos de ces récents étalages de bonne fortune où chacun dévoilait à qui mieux-mieux son accumulation d’appartements, de maisons de campagne ou de ville, d’œuvres d’art, de véhicules de luxe ou de vielles guimbardes brinquebalantes, voire de bicyclettes dont on ne sait même pas si elles sont rutilantes.

 

Et puis, une proposition incongrue : le patrimoine des sans-abris. Ne remet-elle pas à sa place l’indécent déballage qui nous a été proposé ces derniers jours ? Car enfin, sérieusement, ceux qui exposent ainsi au prétexte de transparence ce qu’ils ont acquis ou reçu par une heureuse naissance, ont-il la moindre idée de ce que cela représente pour le commun des mortels ?

 

Je prendrais comme référence le capital considéré comme une fortune pour l’impôt, soit le seuil de l’ISF qui est de 1,3 millions d’euros. C’est plus d’un siècle de SMIC. Ou encore un siècle d’économies pour quelqu’un qui gagnerait 5000€ par mois et en mettrait 20% de côté. Cela suffit avec les chiffres, je voulais juste dire qu’il n’est pas possible d’obtenir une telle fortune avec des revenus du travail, même avec un salaire qui pour beaucoup semble énorme.

 

A lire toutes les déclarations récentes, on pourrait croire pourtant que ces « patrimoines » sont normaux et d’une banalité tout à fait commune. Eh bien non !

 

Chaque matin, en partant travailler, je croise ces morts errants. Ceux que la société a rejetés et qui se débrouillent comme il peuvent pour survivre. Morts pour la société des gens normaux, qui ont ou qui rêvent d’avoir ce fameux patrimoine qui fait qu’on a réussi sa vie, même si elle est un désert brillant. Je pense à ces hommes sans âge qui déclament leur histoire, réelle ou inventée, dans les voitures du métro pour obtenir quelques pièces. Je pense à cette femme qui est assise tous les matins dans cette salle immense où se croisent, sous Paris, des milliers de gens qui ne la regardent pas, pas plus qu’ils ne se voient entre eux, cette femme assise avec la photo de ses enfants chaque jour, sauf le mercredi puisque ce jour là, ils sont en chair et en os près d’elle. Je pense aussi à cet homme, régulièrement installé un peu plus loin qui semble noyer ce qui lui reste d’existence dans une bouteille dont le bouchon, toujours, a été repoussé dans le vin faute d’un autre moyen de l’ouvrir. C’est donc son patrimoine à lui dont je vais ici dresser l’inventaire :

 

·        Un pantalon usé, taché, crasseux

·        Un reste de pull-over usé, taché, crasseux aussi

·        Un carton

·        Une bouteille entamée à partager avec qui en veut

 

Voilà, c’est tout. On lui pardonnera d’avoir accumulé autant en une vie. Parfois, en plus, il chante. J’en déduis qu’il a aussi un patrimoine intérieur, mais celui-là, nous aurons ensemble la pudeur de ne pas le divulguer.

 


 

Alternative Libertaire 1985 3

Partager cet article
Repost0

commentaires

O
<br /> Tu as raison Lyonnel. Ce déballage n'a aucun sens. Le problème, pour faire de la politique, n'est pas d'être d'apparaître riche ou pauvre, mais de montrer sa compétence à gérer correctement<br /> le pays, sans se servir de ses fonctions politiques pour s'enrichir...<br /> Nous sommes vraiment dans la société du spectacle!<br /> Ophélie<br />
Répondre
L
<br /> <br /> Du spectacle, de la communication calibrée mais rien de bien bon. Et tous ceux qui ne sont pas dans la norme, d'une façon ou d'une autre, sont oubliés.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> coucou<br /> <br /> <br />  ce deballage  nous fais coomprendre pourquoi  ces gens la  aiment faire de la politique     bonne journée<br /> <br /> <br /> Marcel<br />
Répondre
L
<br /> <br /> Oui, mais moi ce qui me choque, c'est que des types de base qui font de la politique, ou du syndicalisme, j'en connais, et ils sont honnêtes et convaincus, quelque soit leur bord d'ailleurs. Là,<br /> je réagissais à l'initiative de la Croix Rouge de détourner l'opération de com "débalage" des politiciens.<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> mais de ces gens là on en parle jamais on les ignore il faut dire aussi qu'ils ne sont pas tjs faciles par les grands froids, ils ne veulent pas être sous un toit mais c'est vraiment triste à<br /> notre époque de voir ça alors qu'il y a des logements vacants<br />
Répondre
L
<br /> <br /> Le vrai problème, c'est qu'on refuse d'imaginer qu'on puisse être à leur place. Pourtant, c'est bien vite arrivé, un plan social, une séparation, une maladie. Et hop...<br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> Texte fort,marquant;qui remet  un peu les pendules à l'heure,pour combien de temps Cher Lyonnel,non que je sois pessimiste mais,réaliste.Allez buvons un verre avec nos potes de la rue et<br /> merde à Vauban comme disait Léo F.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> bonne journée<br /> <br /> <br /> papyanar himself<br /> <br /> <br />  <br />
Répondre
L
<br /> <br /> Ah si on invoque Léo, forcément. Les Léo d'aujourd'hui, ils font du rap et moi, là, je n'accroche pas, question de génération sans doute.<br /> <br /> <br /> Je viens  de rechercher les paroles de "Merde à Vauban". 1960 dis donc! Tu changes deux mots, tu remplaces Vauban par un moderne, et hop c'est prêt pour La Fouine ou Booba!!!<br /> <br /> <br /> <br />