Vendredi ! Chaque semaine, je m’offre, pour deux euros, le droit de rêver. Aujourd’hui, ce sont cent millions qui sont proposés. Oh, je sais bien que les probabilités sont contre moi, qu’il est presque impossible que je reçoive demain cette fortune. Oui, mais tout est dans le « presque ». Infinitésimale, pas nulle.
Les deux euros que j’ai payé, c’est le prix de l’imagination, le droit de planifier l’utilisation de cette fortune. Comme tout le monde, sans doute, je m’offrirais quelques plaisir égoïstes. Un Saint Emillion de grand millésime, un Armagnac longtemps vieilli, que sais-je. Non, pas de voiture de sport. Probablement pas non plus de maison luxueuse, je n’aime guère ce milieu. Peut-être, si elle était à vendre achèterais-je la maison où je suis né, où je ne retrouverais pourtant pas les souvenirs qui y sont nés aussi mais se sont envolés depuis longtemps.
C’est vrai que cette semaine, c’est une somme. Elle permet de faire grossir les rêves. J’aimerais acheter quelques appartements dans les beaux quartiers, certainement pas pour les habituer car on s’ennuie chez les bourgeois hautains calfeutrés derrière leurs portes blindées. Non, je les louerais pour une bouchée de pain à des pouilleux, à ceux dont les méprisants personnages qui aiment ces morceaux de villes réservés veulent fuir. L’idée me plaît.
On ne peut pas changer le monde avec cet argent, sans doute. Sinon, d’autres qui ont des moyens bien plus grands y seraient parvenus. Tiens, drôle de mot. Mais au moins peut-on apporter sa pierre à l’édifice, il y a tant à faire, on n’a même pas creusé les fondations. Il est vrai que dans notre société, pour avoir de l’argent, comme pour le pouvoir, il faut d’abord le vouloir, le désirer, et fort. L’argent est devenu un but pour certains qui ne se rendent même plus compte que leur accumulation égoïste, qui se nourrit de la misère d’une multitude, est insensée.
Ah oui, 325000 francs. Le monde n’a pas tellement changé depuis 1955.
PS: j'ai changé la date pour remettre le post sur Chinua Achebe en tête.